Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Jeu Nov 25, 2021 2:16 pm Sujet du message: Carol Emshwiller - La monture
Smiley est beau et robuste, de bonne lignée, c'est pourquoi il a été sélectionné comme monture pour un futur dirigeant Hoot encore jeune, comme lui. Smiley est ravi de s'entraîner quotidiennement à être monté, fier de ses jambes musclées et impatient de grandir pour participer à des courses pour prouver sa valeur. Bref, Smiley est une monture Domptée qui ne demande qu'à satisfaire les Hoots en satisfaisant à tous leurs désirs. Après tout, les Hoots sont gentils et s'occupent bien de leurs montures, non ? Ils sont plus intelligents, ont des sens plus affutés et dominent naturellement leurs montures.
Smiley a aussi un nom de personne, Charley. Il ne l'utilise pas avec les Hoots car les montures doivent rester silencieuses et obéissantes en présence des Hoots, mais il l'utilise parfois parmi les siens, les "nous" comme il les appelle. Les humains.
La vie de Smiley/Charley bascule quand un groupe d'humains Sauvages menés par son père attaque la ville où il habite pour y libérer les humains et assassiner les Hoots. Charley ne veut pas être libre, il préfère le confort dont les Hoots entourent leurs montures préférées. Il ne veut pas qu'on fasse du mal à son Petit-Maître, qu'il est content de servir. Dans le village de montagne où il trouve refuge avec les rebelles, Charley va voir sa vie prendre une nouvelle voie.
Carol Emshwiller imagine dans La monture une Terre occupée par des extraterrestres herbivores. Naufragés sur notre planète, les Hoots ont réduit les humains en esclavage. Ceux-ci s'occupent des corvées et surtout servent de montures aux Hoots, quasiment incapables de marcher par eux-mêmes à cause de leurs toutes petite jambes.
Les relations Hoots/humains du roman semblent calquées sur la relation humains/chevaux de notre monde. Les humains y sont élevés en fonction de leur physique, tracés et marqués, ils se reproduisent dans des lignées dédiées à la course ou l'endurance, et les croisements imprévus sont méprisés et rejetés. Leurs maîtres les mettent en valeur en les coiffant, en les harnachant de soie et d'argent, en leur apprenant à trotter la tête haute dans une allure gracieuse. Les maisons des Hoots sont décorées de tableaux représentant des humains ou des rubans gagnés par leurs montures. Ils les encouragent, leur offrent de petites friandises quand ils se comportent bien.
Difficile de ne pas faire le parallèle avec les petites filles folles de chevaux, qui vont passer des heures à tresser la crinière de leur ami poney et leur distribuer des bonbons, et coller posters et flots sur les murs de leurs chambres ! Difficile de ne pas voir un marchand de chevaux quand les Hoots examinent les dents pour connaître l'âge, difficile de ne pas entendre un moniteur d'équitation quand l'entraîneur crie à Petit-Maître "Regarde où tu vas afin que ta monture le sache aussi !".
Mais comme dans l'équitation, tout n'est pas vraiment parfait. La monture n'a pas son mot à dire et doit accepter les décisions du maître qui sait - ou croit savoir - ce qui est le mieux pour elle. Qu'elle résiste, et la douceur laissera la place à la violence et la contrainte, avec des éperons et des mors durs, des punitions au lieu des récompenses.
La relation propriétaire / animal de compagnie en vient à ressembler plus à un rapport de force maître / esclave. Malgré leur puissance, les chevaux ne sont pas équipés pour une rébellion organisée ; les humains, si, d'autant qu'ils partagent un langage commun avec les oppresseurs.
Charley est né esclave et accepte naturellement la situation, qu'il considère comme normale. Ce n'est pas le cas de tous les humains, et le rébellion est en marche. Les humains se battent pour être libres, pour avoir le choix. Une cohabitation plus harmonieuse entre les deux espèces est-elle possible ?
La plupart du temps, c'est Charley qui raconte, même si ce n'est pas toujours le cas. Il est jeune (onze ans au début du récit), il ne comprend pas tout ce qu'il se passe autour de lui. Entièrement apprivoisé, il est complètement acquis à la cause des Hoots, convaincu par leur propagande, et sa vision est biaisée en leur faveur. Il ne parle pas toujours très bien, non plus. Cela rend le texte parfois difficile à lire, avec des passages que l'on ne comprend pas forcément. La lecture peut ainsi être un peu exigeante par moments.
J'ai noté quelques coquilles, mais assez rares pour ne pas gêner la lecture.
C'est un roman intelligent, prenant et bien écrit. Je l'ai beaucoup aimé et je pense qu'il pourra plaire également à un large public. Laissez-vous tenter !
Chronique réalisée pour Les Chroniques de l'Imaginaire _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Bon, donc, c'est La Planète sauvage de Stefan Wul, mais avec des Draags qui utilisent les Oms comme montures, c'est ça ? Mhm. _________________ Si ça vous intéresse : mon blog de lectures (dont des messages postés sur le Coin et étoffés pour l'occasion) et un site sur mes publications
Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Mer Déc 22, 2021 8:09 am Sujet du message:
Je ne connais pas La planète sauvage ;-) _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Inscrit le: 13 Nov 2010 Messages: 153 Localisation: Alsace
Posté le: Mer Déc 22, 2021 9:37 am Sujet du message:
Le titre du roman est : "Oms en série"
La planète sauvage est le titre du film qui en a été tiré. _________________ Vieillir est le meilleur moyen de vivre longtemps
Inscrit le: 27 Juin 2011 Messages: 3318 Localisation: Great North
Posté le: Dim Déc 26, 2021 3:40 pm Sujet du message:
J'ai fini La monture de Carol Emshwiller, une fable sur l'esclavage où les hommes sont utilisés comme des chevaux par des E.T. ayant envahi la terre. La métaphore équestre ne tient pas longtemps car, comme l'avait dit Condorcet :
"D’ailleurs, un homme n’est pas un cheval, et un homme mis au régime de captivité du cheval le plus humainement traité, serait encore très malheureux. Les animaux ne sentent que les coups ou la gêne, les hommes sentent l’injustice et l’outrage ; les animaux n’ont que des besoins, mais l’homme est misérable par des privations ; le cheval ne souffre que de la douleur qu’il ressent, l’homme est révolté de l’injustice de celui qui le frappe. Les animaux ne sont malheureux que pour le moment présent, le malheur de l’homme dans un instant embrasse toute sa vie. "
Le bouquin est passionnant, même si la fin me semble fort optimiste, avec une narration entièrement en points-de-vue internes très originale, hautement recommandable. _________________ "Tout est dans tout et réciproquement ."
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