Inscrit le: 10 Juin 2007 Messages: 640 Localisation: Ailleurs
Posté le: Jeu Déc 06, 2007 7:50 pm Sujet du message: La confession d'un enfant du siècle - Alfred de Musset
Pour "Le coin des lecteurs", Octave, personnage principal de l'oeuvre La confession d'un enfant du siècle, a accepté le rendez-vous que L lui a donné. La rencontre est entièrement retransmise ici.
_Bonsoir Octave. Je vous remecie d'avoir accepté cette entrevue.
_Bonsoir L. Le plaisir est pour moi.
_Je vous en prie, appelez-moi L.
_Bien. Alors, ayez l'obligeance de me nommer Alfred.
_Je vous remercie mais ne préfère pas, Octave. J'aurais bien trop peur de vous confondre avec votre frère, écrivain, celui-là même qui a mis votre âme à nue dans ce récit dont nous avons à parler tous deux ce soir.
_Bien...Mais sachez qu'entres nous, seuls les corps sont dissociés. Alors si mon âme a été mise à nue, la sienne aussi, car pour notre malheur, nous la partageons.
_J'avais cru le comprendre oui, mais n'osais vous en faire commentaire. Ainsi, m'est-il permis de croire que cette oeuvre est le reflet de l'amour perdu que votre frère avait pour mademoiselle Sand?
_Oui, c'est un reflet. Mais plus que des noms, ce sont les sentiments qui nous furent communs bien entendu. Mme Pierson, cette femme à qui mon amour rend grâce d'une éclatante façon, dans l'oeuvre, renvoit à l'amour vécu aussi par Alfred. Un amour sans bornes, où la passion s'empare de nous, nous élève à un rang quasi-divin, nous donne une nouvelle vision du monde....parfait.
_Pourtant, Octave, la mélancolie ne vous abandonne pas de tout le récit. Vous êtes trahi d'abord, par une femme que vous aimiez, et vous avez alors une toute autre vision de l'amour que celle dont vous venez de me parler. Une vision dégradante et vile, hypocrite, manipulatrice. Ce n'est que plus tard, quand vous rencontrez Mme Pierson, que celui-ci à de nouveau l'éclat du plus beau des joyaux.
_Je fus débauché oui, mais je le regrette. Cette mélancolie qui me poursuie est dû, je crois, à ce doute qui nous ronge dès qu'il nous tient. Une fois qu'il s'insinue, il n'est plus possible de croire. Ma rencontre avec Brigitte a renversé ce que je pensais être invincible, a fait reculer le doute et renaître la croyance. J'ai de nouveau aimé. Eperdument aimé. Mais le doute n'avait fait que reculer, il n'avait pas disparu. Mais vous devez le savoir....
_Oui. Dites-moi Octave, ça ne fait que 347 pages que nous nous connaissons, mais pourrais-je vous demander votre âge?
_Bien sur. J'ai 22 ans. Alfred en avait 26. Et vous, si ce n'est pas indiscret.
_Pas beaucoup moins que vous. Peut-être est-ce aussi pour ça que je me suis attaché à votre "aventure". Peut-être est-ce car je doute, comme vous, que j'ai apprécié vous suivre. Pensez-vous qu'on puisse avoir vécu à 20 ans, Octave?
_Oui, si on a aimé.
_Car ce verbe ne se conjugue qu'au passé?
_Je crois...mais je ne fais pas autre chose que m'épancher sur cet amour qui, je dois l'avouer, est tout pour moi, dans le récit. Cela vous a-t-il dérangé?
_Non non, je vous rassure. J'ai trouvé vos réflexions passionantes et instructives. De plus, votre frère écrit d'une merveilleuse manière, extrèmement poètique, rendant fidélement les images de l'âme.
_Je vous remercie pour lui. Il n'a pas pu venir ce soir, il est mort voici 150 ans.
_Cela me fait penser à cette interrogation que je me suis faite. Lors de votre période de débauche, vous reniez l'amour dans toutes ses formes, même celle de Dieu. Si aujourd'hui vous avez une vision claire de l'amour humain, celui pour Dieu a-t-il lui aussi évolué?
_Non, et je ne pense pas qu'il changera avant longtemps.
_Pourtant, n'est-ce pas là aussi une croyance, une vénération, qui par le simple doute, peut s'écrouler?
_Oui, c'est certain. Mais j'ai toujours besoin de croire en quelque chose. Sans quoi,....
_Je vous comprends, bien que j'avoue ne pas vous suivre sur ce chemin là. Pour moi, toutes les croyances se valent. Avant de nous quitter, je voulais vous dire de ne pas avoir peur de la solitude. Cette solitude qui s'empare de tous dès que le silence apparait, dès que le monde disparait.
Je crois que la solitude est une des plus belles choses qui soit. Bien sur autour d'elle gravite tristesse, désespoir et doute, et la passion qui vous anime tant quand vous aimez n'est rien de plus qu'un frêle courant d'air, mais si elle est Belle, c'est car elle, avant tout, ne ment pas. La solitude ne ment pas Octave.
_Mais qui a encore envie de vérité aujourd'hui? Le bonheur a un prix que quiconque n'a jamais hésité à payer. Ce prix, c'est le mensonge. Maintenant, j'avoue n'en payer qu'une partie...
_Où allez-vous Octave?
_Comme tout le monde L, continuez de mourir.
_De vivre, vous voulez dire?
_Surement.... _________________ Brise et ruine d’abord ce monde, nous verrons si l’autre surgit ensuite
Inscrit le: 26 Avr 2007 Messages: 840 Localisation: France
Posté le: Lun Jan 24, 2022 9:03 pm Sujet du message:
Si un auteur moderne cherchait délibérément à représenter une relation toxique, je pense qu'il aurait beaucoup de mal à en imaginer une plus parfaite incarnation que le couple Octave/Brigitte.
Parmi tous les personnages fictifs du XIXème siècle, il n'y en a pas beaucoup que j'ai haï autant que le narrateur de ce livre. Ce n'était d'abord que ses états d'âme et ses jérémiades que je trouvais pénibles, mais son comportement lui-même devient fortement désagréable pendant sa relation avec Brigitte (double de George Sand) : il se montre soupçonneux ou blessant sans raison, puis s'excuse, puis recommence, et exerce sans cesse un chantage émotionnel pour empêcher qu'elle le quitte.
J'ai failli lire le dernier tiers du livre en diagonale. Mais en fin de compte, le narrateur se rend lui-même compte qu'il est devenu détestable, ce qui ne l'excuse en rien mais le rend plus intéressant.
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