Inscrit le: 10 Juin 2007 Messages: 640 Localisation: Ailleurs
Posté le: Mar Mai 12, 2009 9:51 pm Sujet du message: Mangez-le si vous voulez - Jean Teulé
En ce mardi 16 août 1870, journée ensoleillée si il en est, Alain de Monéys se rend à Hautefaye, petit village de Dordogne, voisin au sien, pour la foire annuelle. Il s'y rend pour rendre service à quelques personnes. Il est aimé de tous, étant bon et généreux avec ceux qu'il côtoie. Pourtant, ce bon Alain ne tardera pas à se trouver victime au sein d'une horrible situation.
Il arrive parfois que tout ne se passe pas exactement comme on l'avait prévu. Et il semble très difficile de prévoir la bêtise humaine.
Une anecdote qui marqua le XIXème siècle que cette histoire, avant tout. Un fait divers comme les journaux à sensation de la belle époque n'aurait pu en rêver mieux, et qui donne au récit de Teulé une force certaine.
Utilisant un vocabulaire propre à l'époque et au lieu (enfin, me semble-t-il), prenant le temps de présenter, en une introduction de quelques chapitres, le protagoniste principal, l'immersion dans le monde d'Alain de Monéys et l'empathie que nous ressentons pour lui est rapidement faite.
Bien nous en fasse, car c'est très vite que l'auteur renverse la situation pour nous plonger dans l'absurdité la plus totale, puis la colère, la fureur et enfin la folie.
Mangez le si vous voulez peint le tableau d'une population qui sous tension (La guerre Franco-Prussienne, sur le point d'être perdue, la saison sèche, ...) va commettre l'irréparable. Et quoi de plus naturel qu'un bouc émissaire pour étouffer nos craintes, et nos haines? Teulé n'écrit pas un roman au sujet passéiste, mais bel et bien intemporel.
La descente aux enfers qu'il nous décrit prend d'abord des aspects grotesques, qui poussent à sourire, avant que la réalité de l'action se joignent aux idées et que l'horreur prenne place. Si l'agonie peut paraître assez longue (Environ les 3/4 du roman), elle va crescendo, malmenant le lecteur autant que la victime, ne lui évitant aucun détail de la torture infligé. La foule prend la forme d'une seule et unique créature, innarétable (le sacrifice de certains personnage ne changera rien), et on en vient vite à s'en rendre compte. Chaque moment de souffle est un espoir rapidement perdu. "Vous 'y échapperez pas", semble nous dire l'auteur.
En tête de chaque chapitre est tracé le chemin parcouru par notre "prussien". Balade difficile - risque de mort: 2h aller (sans retour).
Malgré un vocabulaire parfois trop désuet pour qu'on puisse y prendre un réel plaisir de lecture, Mangez le si vous voulez reste un met appréciable. _________________ Brise et ruine d’abord ce monde, nous verrons si l’autre surgit ensuite
Posté le: Mer Mai 20, 2009 6:08 pm Sujet du message:
Pour ceux qui serait dans le coin et que ça intéresse : Jean Teulé dédicace "Mangez-le si vous voulez" à la librairie Coiffard de Nantes samedi 30 mai 2009 à 14h30.
A bon entendeur, salut!
Inscrit le: 16 Mai 2009 Messages: 3029 Localisation: Loire
Posté le: Lun Nov 16, 2009 10:16 pm Sujet du message:
Le format très court du roman est vraiment bien choisi : en effet, l'histoire est suffisamment violente pour se suffire à elle-même, pas la peine d'épiloguer, ce que l'auteur a parfaitement compris. C'est bien écrit, concis, direct, clair, sans trop de sentimentalisme, c'est fort, violent, vibrant.
Bref, un moment de lecture qui ne laisse pas indifférent, autant par l'histoire racontée que par la forme. _________________ On ne sait jamais ce que notre malchance nous a évité de pire. Cormac McCarthy
Inscrit le: 23 Nov 2010 Messages: 1049 Localisation: Lille
Posté le: Ven Sep 09, 2011 10:05 pm Sujet du message:
En lisant ce court roman je me suis souvenue de ce qui m'avait déplu dans Le Montespan : l'humour à tout propos.
C'est un fait divers tragique, ignoble, véridique, cette victime a réellement subi ces tortures, et de lire autant de touches d'humour ça m'a gênée. Parce que d'un côté ça permet d'édulcorer les atrocités relatées, mais du coup ça instaure une distanciation qui m'a empechée d'éprouver de l'empathie pour Alain. Et je me sens mal non pas parce que l'histoire est immonde mais parce qu'à certains moments j'ai ri.
En dehors de l'écriture c'est un fait divers qui me sidère, ça m'a rappelé l'essai La psychologie des foules de Gustave Le Bon, duquel il ressort qu'en groupe les gens perdent leur bon sens et se laissent entrainer dans des trucs qui ne leur seraient jamais venu à l'esprit individuellement. _________________ “Un livre n'est pas seulement un ami, il vous aide à en acquérir de nouveaux. Quand vous vous êtes nourri l'esprit et l'âme d'un livre, vous vous êtes enrichis. Mais vous l'êtes trois fois plus quand vous le transmettez ensuite à autrui.”
Inscrit le: 07 Déc 2010 Messages: 473 Localisation: Loir et Cher
Posté le: Sam Avr 21, 2012 2:12 am Sujet du message:
Je viens de le lire d'une traite. Au moment où j'écris ces lignes, je pleure. Je ne veux pas aller me coucher juste après ça. Les images décrites vont me poursuivre longtemps. Je le crains.
Impossible d'arrêter la lecture sans avoir le cruel sentiment d'abandonner ce pauvre homme sur son chemin de croix. _________________ N'est déçu que celui qui croit trop. N'est heureux que celui qui croit assez.
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