Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Lun Déc 30, 2019 8:40 pm Sujet du message: Sombre comme l'Aurore - Jean-Baptiste Lamy
En Haut de la Citadelle règne depuis plusieurs siècles le Roi de Saphir. Tous les habitants y sont nobles et richissimes, débordant d'or et de pierres précieuses. Le travail physique y est inutile, remplacé par la magie, qui maintient également les gens à l'abri de la maladie. C'est le paradis, vu d'en Bas.
Car en Bas, les gens vivent de façon plus ordinaire, dans le labeur. Le peuple choisit des devins pour le représenter à la Loge, et celle-ci est dirigée par l'un des devins élu par ses pairs. Le plus grand danger vient des forfaits incessants de la maléfique Reine Noire, puissante sorcière et maîtresse du Royaume des Morts, que l'on rend responsable de tous les maux : maladies, morts, disparitions...
Entre Haut et Bas, une unique nacelle téléphérique qui met plusieurs heures à faire le trajet, étroitement contrôlée par le Donjon de la Monte sous l'autorité d'en Haut. Officiellement, le Haut et le Bas sont en guerre depuis des siècles, même si en fait il s'agit plutôt désormais d'un statut quo prudent permettant quelques échanges. Les deux cités sont si différentes qu'elles pourraient aussi bien être dans deux mondes distincts.
Crépusculine, la fille cadette du roi d'en Haut, a toujours rêvé d'en Bas. Penchée au bord de la terrasse, elle scrute de sa lunette les rues lointaines en dessous d'elle. Comment vit-on en Bas ?
Tienn Sanzelle, pour sa part, ne s'est jamais plus que ça intéressé à l'autre moitié de la Citadelle. Fils d'un voleur de la ville Basse, il s'apprête à satisfaire l'ambition de ses parents en devenant assistant à la Loge. Pour lui, le temps de l'enfance se termine et il doit s'éloigner de ses amis de toujours : Rakenn, dont les talents magiques ont été jugés suffisamment prometteurs pour qu'il soit accepté comme apprenti sorcier en Haut ; le Capitann, marchand qui va reprendre la boutique de son père ; et Alyse, la seule fille de leur groupe, qui intègre le Chapitre de chevalerie.
Quand Tienn rencontre Crépusculine, descendue incognito dans l'espoir de retrouver sa mère disparue, leurs cœurs s'accordent. Les amours verticales sont impossibles, tout le monde le sait. Mais Tienn est résolu à retrouver sa belle, même s'il lui faut pour cela monter plus Haut qu'il n'aurait pu l'imaginer...
Sombre comme l'Aurore oppose deux mondes qui se côtoient mais qui sont malgré tout formidablement éloignés. Le Bas de la Citadelle ressemble beaucoup à notre monde, en mode médiéval : c'est une cité portuaire côtoyant champs et forêts, avec un régime démocratique un peu chaotique mais globalement satisfaisant. Comme le roman est exclusivement centré sur la Citadelle, on ne saura rien de plus du reste du vaste monde, mais il ne semble pas présenter d'intérêt particulier.
Le Haut par contre est résolument fantasy, perché loin au dessus du soleil, habité de personnages ailés dont la plupart sont sorciers. D'apparence idyllique, il présente cependant nombre d'inconvénients : sa surface est si exiguë que la place est comptée, les habitants sont tous plus ou moins cousins et se connaissent tous, d'ailleurs ils partagent même leurs titres puisque l'on y trouve des quart, tiers ou demi barons, comtes ou ducs ! Les rares "montants" arrivés d'en Bas sont méprisés : ils ont certes de beaux bijoux, mais doivent trimer comme des esclaves pour la vraie richesse d'en Haut, la nourriture. Car il n'y a guère de place pour les cultures, qui de toute façon poussent mal vu l'altitude élevée. Et pour finir avec les désagréments du royaume d'en Haut, il faut citer la "règle de mort des sorciers", qui autorise/encourage tout un chacun à tuer son prochain pour hériter tout à fait légalement de ses titres et de ses biens, ce qui fait que les assassinats sont monnaie courante.
Il n'est donc pas si surprenant que Crépusculine ait eu envie de voir plus loin que sa prison dorée et étriquée. Le désir de rapprochement des deux jeunes gens va se heurter à la difficulté pour deux mondes différents, deux cultures opposées, de se comprendre et de cohabiter harmonieusement. Mais les obstacles (magie, trahison et nombreux autres impondérables) ne vont pas arrêter Tienn, qui est aussi courageux que le héros légendaire dont il porte le nom. Il est également un brin artiste (il joue de la lyre et compose - ou tente de composer - des chansons) et surtout très idéaliste.
La moralité sous-jacente au récit est assez manifeste. On y aborde des réflexions politiques, en comparant les régimes du Haut et du Bas. Les amis de Tienn, chacun excellent dans son activité, sont touchés par les travers afférents : recherche éternelle de plus de pouvoir, plus d'argent, plus d'héroïsme... Rien d'ouvertement racoleur cependant, c'est bien intégré au récit.
La facilité avec laquelle certains rebondissements adviennent, l'aspect circulaire du récit (par exemple le parallèle entre l'histoire du premier Tienn Halidenn et ce Tienn-ci, mais pas que) donnent au roman le ton d'un conte fantastique.
La plume est très poétique, sans lourdeur, on prend beaucoup de plaisir à lire cette prose belle et riche. La moitié des chapitres sont racontés à la première personne par Tienn, les autres ont un point de vue externe sur les personnages qui l'entourent.
J'ai aimé le rythme bien mené du récit (même si la première moitié du roman, plus introductive, présente parfois quelques longueurs), les différentes péripéties tantôt sombres tantôt plus humoristiques qui jalonnent l'intrigue. J'ai aimé la magie discrète mais omniprésente. J'ai aimé le mystère qui entoure le rôle et l'identité de la Reine Noire : on ne suit pas toujours de suite... Cela appelle sûrement à une relecture pour mieux apprécier toutes les subtilités.
Je ressors de ma lecture largement convaincue, cela a vraiment été une belle surprise. Envie d'aventure, d'amour, de magie, de poésie et plus encore ? Ce livre est pour vous !
Chronique réalisée pour Les Chroniques de l'Imaginaire _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Mar Déc 31, 2019 9:09 pm Sujet du message:
Ho, j'espère que ça te plaira ! _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Inscrit le: 14 Aoû 2003 Messages: 4654 Localisation: à l'ouest
Posté le: Jeu Jan 09, 2020 4:08 pm Sujet du message:
Alors j'ai beaucoup aimé même si cet univers tout en hauteur me donnait une sensation de vertige pendant ma lecture ^^ et j'ai apprécié les différents jeux de mot.. _________________ Fantasy can become reality (Stratovarius).
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