Inscrit le: 26 Avr 2007 Messages: 840 Localisation: France
Posté le: Ven Oct 08, 2010 4:36 am Sujet du message: L'Education Sentimentale - Gustave Flaubert
L'éducation sentimentale raconte l'histoire de Frédéric Moreau, un jeune homme qui va être saisi pour une femme mariée et plus âgée - Mme Arnoux - d'une passion qui ne l'abandonnera jamais et qu'il ne réussira pourtant jamais à faire aboutir.
L'histoire se déroule de 1840 à 1851, avec une conclusion en 1867. On ne peut pas dire qu'il s'y passe grand-chose... mais c'est normal puisque le roman raconte en fin de compte la manière dont Frédéric va rater son existence par passivité et par mollesse. Il va rester spectateur des évènements politiques de son époque (qui incluent la révolution de 48 et le coup d'état de 51) ; il va laisser filer toutes les opportunités qui s'offrent à lui de devenir un personnage important et puissant ; il va se montrer incapable de nouer une relation sentimentale sincère et solide avec l'une des quatre femmes avec lesquelles ce serait possible.
Frédéric, d'après ce que j'ai compris, est assez nettement inspiré de Flaubert lui-même, qui transpose dans ce roman une relation qu'il a lui-même eu avec une femme plus âgée. C'est un personnage frustrant, que - contrairement à Meneldur - je trouve davantage tête à claques qu'Emma Bovary (la vie lui offre autrement plus de chances d'obtenir ce qu'il désire). Son obsession pour Mme Arnoux est son seul sentiment à la fois significatif et durable. Elle semble parfois diminuer, mais finit toujours par rejaillir et décide de beaucoup de ses actions. Pour le reste, Frédéric se contente de vivre au jour le jour avec un manque d'énergie désespérant.
Frédéric est donc quelqu'un d'objectivement ennuyeux et pourtant, d'une certaine manière, cette absence de dynamisme (et l'absence de réussite qu'elle engendre) en fait un personnage plus réaliste que beaucoup de ceux qu'on trouve dans les romans d'autres auteurs de l'époque. Ce réalisme s'applique également aux personnages qui l'entourent, qui se distinguent très rarement par une grandeur quelconque. Le réalisme de Flaubert est une médiocrité dont l'omniprésence finit par être assez glauque.
L'éducation sentimentale est apparemment une sorte de réponse au Lys dans la vallée de Balzac (ce sont deux livres que j'ai lus au lycée et qui ne m'ont laissé virtuellement aucun souvenir, sinon que j'avais tendance à les confondre). Au-delà du scénario (jeune homme amoureux d'une femme plus âgée), j'ai aussi eu le sentiment que Flaubert satirisait quelque peu les jeunes héros avides d'ascension sociale chers à Balzac.
Pour conclure sur un point de vue plus subjectif, je dois reconnaître que le livre ne m'a pas franchement passionné. Flaubert atteint indiscutablement son but... mais le problème, c'est que ce but est de décrire une vie creuse, passive et manquée. Il y a bien sûr très peu de sentiment de progression. La vie de Frédéric stagne, marquée par des évènements quelconques. Il y a un nombre invraisemblable de scènes où on le voit participer à un repas avec des amis ou des relations (et j'ai beau être un fieffé goinfre, ça lasse après la deuxième fois).
La fin du livre (ce qui se passe fin 1851 et la conclusion 16 ans plus tard) m'a cependant bien plu. L'insuccès de Frédéric cesse d'être frustrant en devenant définitif. Cette fin est pleine d'une profonde mélancolie, que j'ai trouvée de très bonne qualité. J'ai eu plaisir à terminer ainsi ce livre, même si mon impression d'ensemble reste un peu mitigée.
Posté le: Ven Oct 08, 2010 10:45 pm Sujet du message: Re: L'Education Sentimentale - Gustave Flaubert
Concernant Frédéric, je suppose que c'est surtout affaire de goûts. J'ai toujours été attiré par les perdants, que ce soit le destin ou leurs propres faiblesses qui les conduisent au fond du caniveau.
Bon, je vais me répéter, mais : meilleur roman de Flaubert selon moi (quoiqu'il me reste à lire Bouvard et Pécuchet).
Inscrit le: 26 Avr 2007 Messages: 840 Localisation: France
Posté le: Ven Oct 08, 2010 11:31 pm Sujet du message: Re: L'Education Sentimentale - Gustave Flaubert
Meneldur a écrit:
Concernant Frédéric, je suppose que c'est surtout affaire de goûts. J'ai toujours été attiré par les perdants, que ce soit le destin ou leurs propres faiblesses qui les conduisent au fond du caniveau.
Je pense aussi que les points de vue sur les personnages littéraires sont souvent très subjectifs. Personnellement, Frédéric m'agace d'autant plus que je reconnais en lui des défauts que je possède.
Cela étant dit, ce n'est pas tant le personnage lui-même que son histoire (fort peu remplie) que je trouve pénible.
Inscrit le: 19 Mar 2007 Messages: 1489 Localisation: Paris
Posté le: Sam Oct 09, 2010 10:48 pm Sujet du message:
Déplacé depuis "Que lisez-vous en octobre 2010 ?" :
Oui, c'est normal d'avoir l'impression qu'il ne se passe rien dans L'Education sentimentale : c'est le principe même du livre ! Même que j'aurais bien aimé avoir un cours dessus pour mieux le comprendre (à défaut, une bonne préface devrait pouvoir compenser ça), mais c'est en bonne partie un roman sur l'échec. Flaubert n'a pas fait ça par maladresse ("oups, 300 pages et j'ai toujours pas mis de vraie action, où avais-je la tête ?" ). Ce qui n'empêche pas que ce n'est pas son roman le plus facile à apprécier : personnellement j'aime beaucoup le principe, mais ce n'est pas mon préféré.
Inscrit le: 24 Mar 2008 Messages: 3282 Localisation: Dans la lune
Posté le: Sam Oct 09, 2010 11:13 pm Sujet du message:
C'est normal que ça ne raconte rien : c'est l'histoire d'un p'tit gars qui a des velléités de devenir important et de séduire la femme qu'il aime. Mais il passe à côté de tout, rate tout. Il passe à côté de ses ambitions, de son amour, de l'Histoire... C'est un amas d'anecdotes et d'échecs successifs. Quelques épisodes marquants : le coup de foudre avec Mme Arnoux, la révolution de 1948, le moment où Frédéric revoit Mme Arnoux qui lui fait sa déclaration... mais perdus dans la masse.
C'est la caricature du jeune Romantique dans un monde de brutes. Sauf que le jeune romantique est une tête à claques. C'est une déconnade, ce roman, une réaction contre le Romantisme et tutti quanti.
Spoiler:
On le comprend avec la fin : le meilleur souvenir de Frédéric et de son copain, c'est quand ils sont allés au bordel pour la 1ere fois et que Frédéric, honteux, est parti en courant avant même d'avoir conclu... ce qui explique un peu tout le livre, puisqu'il échoue avant même d'avoir entrepris quelque chose.
_________________ Garde tes songes ;
les sages n'en ont pas d'aussi beaux que les fous!
Inscrit le: 30 Juin 2004 Messages: 5671 Localisation: Physiquement : Cergy, France. Mentalement : MIA
Posté le: Lun Oct 11, 2010 12:32 pm Sujet du message:
En fait, c'est un emo avant l'heure ? _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman
Posté le: Mar Oct 12, 2010 9:51 pm Sujet du message:
J'avais commencé à lire ce roman cet été et malgré l'écriture remarquable de Flaubert, magnifique même, j'avais abandonné au début de la deuxième partie du roman. Il ne se passe rien effectivement et lorsque je lis un livre, j'ai besoin que les personnages me parlent. Il faut que je puisse soit m'identifier aux personnages, soit les détester, etc... Frédéric me laissait totalement indifférent.
J'essaierai sûrement dans quelques années de relire ce roman.
Inscrit le: 31 Aoû 2012 Messages: 2 Localisation: France
Posté le: Ven Aoû 31, 2012 6:45 pm Sujet du message:
Bon, je l'avoue, ce livre est très pénible au début, on se demande si on va parvenir jusqu'au bout. Mais personnelement, j'ai été prise par le flot de l'histoire et j'en suis devenu "accro". xD
La moralité du livre ? je ne saurais pas le dire mais j'en ai fait des hypothèses
Bon j'ai 15 ans donc j'essairai de le relire plus tard, afin de mieux comprendre et d'éviter de sortir le dictionnaire toute les trois lignes
Ce que je garde de ce livre : une histoire mystérieuse et une écriture splendide !
Inscrit le: 16 Mai 2009 Messages: 3029 Localisation: Loire
Posté le: Sam Sep 01, 2012 11:13 am Sujet du message:
Ce roman m'a grandement servi lorsque j'ai passé mon DEUG, il y a...pfff.... un grand nombre d'années...
En effet, en oral d'histoire, on devait présenter un roman de notre choix, seul impératif : qu'il soit du 19e siècle.
J'ai choisi celui-ci, je ne sais plus pourquoi.
Quand je l'ai annoncé au professeur qui me faisait passer l'épreuve, il a sifflé d'admiration, et m'a demandé si j'avais réussi à le terminer. J'ai dit oui. Il m'a félicitée. Il m'a dit que lui-même n'avait jamais réussi à le finir, et il m'a dit "bon, si cela ne vous gêne pas, on va parler d'un autre roman de cette époque". Du coup, j'ai parlé de Au bonheur des Dames de Zola (si je me souviens bien) et j'ai eu 16/20 (la meilleure note de ma promo, c'était un prof exigeant)
Le souvenir que je garde de cette lecture est un grand, très grand ennui... _________________ On ne sait jamais ce que notre malchance nous a évité de pire. Cormac McCarthy
Posté le: Mar Aoû 06, 2019 3:51 pm Sujet du message:
Holala
Pour moi je l'assume, ce livre a été une totale perte de temps.
Bon au moins on ne pourra pas me reprocher de ne pas l'avoir lu (écouté).
Il ne s'y passe rien, et y a rien d'intéressant dedans, mais alors rien de rien, ou alors des trucs qu'on peut très certainement retrouver ailleurs.
Je ne comprends pas pourquoi ce livre est souvent étudié en classe !
J'en ai parlé à une prof de lettres qui m'a dit : "Ah mais si si c'est formidable, ce décalage entre le héros qui est un romantique hors propos et l'époque dans laquelle il évolue et dans laquelle il ne parvient pas à trouver sa place du fait de sa façon de voir les choses".
Ouais bon...très peu pour moi la blague d'écrire un livre pour rien et de demander à d'autres de le lire histoire de
(manque plus qu'une petite phrase à la fin du genre "Cher lecteur, si vous êtes arrivé jusqu'ici, je n'envie pas votre vie qui doit être bien terne pour vous voir obligé de la meubler en ayant lu toutes ces pages.")
C'est bien le premier sondage pour lequel j'ai coché "Pas du tout".
Si vous avez le choix, lisez autre chose
Bon allez, je suis un peu injuste en balançant tout par dessus bord, je me suis tout de même noté quelques tournures :
Gustave Flaubert
(L’Education sentimentale)
Il trouvait que le bonheur mérité par l’excellence de son âme tardait à venir.
Peu d’enfants furent plus battus que son fils.
Un pareil homme valait toutes les femmes.
Il se rongeait le cœur, furieux contre sa jeunesse.
[…] ; et il n’en détachait pas ses yeux, il enfonçait son âme dans la blancheur de cette chair féminine ; […]
[…], vous n’avez pas le droit de m’intéresser à des choses que je réprouve !
Assez d’Andalouses sur la pelouse !
Rien n’est humiliant comme de voir les sots réussir dans les entreprises où l’on échoue.
Cependant, la conscience de mieux valoir que ces hommes atténuait la fatigue de les regarder.
[…] il ne trouvait pas de joint pour y introduire ses sentiments.
On se console des femmes vertueuses avec les autres.
[…], l’air orgueilleux comme un paon, bête comme un dindon ; […]
[...] ; - et si les regards pouvaient user les choses, Frédéric aurait dissous l’horloge à force d’attacher dessus les yeux.
[…] les passions s’étiolent quand on les dépayse, […]
D’abord, la Pologne n’existe pas ; c’est une invention de Lafayette !
Alors il se fit un grand silence ; et tout, dans l’appartement, sembla plus immobile.
[…] (il se croyait peintre en ce temps-là), […]
L’action, pour certains hommes, et d’autant plus impraticable que le désir est plus fort. La méfiance d’eux-mêmes les embarrasse, la crainte de déplaire les épouvante ; […]
[…], avec l’étourderie de ces gens qui étalent leurs trésors dans des auberges.
[…], il ne considérait que les masses et se montrait impitoyable pour les individus.
La Démocratie n’est pas le dévergondage de l’individualisme.
Il y a des hommes qui n’ayant pour mission parmi les autres que de servir d’intermédiaire ; on les franchit comme des ponts, et l’on va plus loin.
Il […] jugerait mieux les choses dans l’éloignement.
[…] il était bien résolu […] à ne plus perdre son cœur dans des passions infructueuses, […]
[…] ; certains hommes se réjouissent de faire faire à leurs amis des choses qui leur sont désagréables.
[…], au milieu des confidences les plus intimes, il y a toujours des restrictions, par fausse honte, délicatesse, pitié.
On rentrait dans la douceur des choses que l’on avait eu peur de perdre ; […]
-Est-ce pour une maladie de neuf mois, ma petite chatte ?
Il y a un moment dans les séparations, où la personne aimée n’est déjà plus avec nous.
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